Alexandre
Photo tirée du livre
Buck Choquette Stampeder
© Henry W. Clark
Rasmuson Library,
University of Alaska-Fairbanks

Alexandre «Buck» Choquette
et la Ruée vers l'or

C'est une histoire fascinante que celle d'Alexandre «Buck» Choquette, un des personnages importants de la Ruée vers l'or (voir sites reliés au sujet) en Alaska, au milieu des années 1800. Il portait si religieusement le costume traditionnel du Far-West, soit la veste et les pantalons en peau de daim (en anglais "Buckskin"), qu'on le surnomma "Buck" et ses garçons "Buck's Boys".

 

Nous remercions particulièrement Fayann Hubert et Ken Choquette, de l'Iowa. Ils nous ont fait parvenir une copie d'un livre intitulé Buck Choquette, Stampeder, publié à compte d'auteur en 1960, par Henry W. Clark, petit-fils de Buck. Le livre en question peut être consulté à la Bibliothèque Rasmuson de l'Université de l'Alaska, à Fairbanks. Nos remerciements aussi à Kay Jabush, bibliothécaire à la Irene Ingle Public Library, de Wrangell, Alaska et à Kathryn H. Shelton, bibliothécaire de l'Alaska State Library.

Dans ce livre de 150 pages, Henry W. Clark relate les aventures romanesques de Buck d'une manière extrêmement détaillée et très certainement "romancée", parfois de façon idyllique. Mais ce documentaire-roman est tout de même le fruit d'une recherche exhaustive dans plusieurs sources historiques, particulièrement les archives de la Compagnie de la Baie d'Hudson, et celles du British (Victoria) Colonist, un journal avec qui Buck entretenait une correspondance régulière. Par contre, nous ne savons pas d'où proviennent les informations concernant l'enfance de Buck au Québec, qui nous ont semblé tenir de la légende plutôt que de la réalité.

Nous vous proposons donc un résumé (quand même un peu long...), entrecoupé de quelques extraits significatifs du livre. Rappelons-nous qu'il a été écrit vers 1960, dans un style quelque peu lyrique. Vous trouverez à la fin une liste de sites reliés à la Ruée vers l'or.

Buck Choquette - Stampeder
par Henry W. Clark ©
résumé

Son enfance au Québec

Alexandre Choquette naît le 17 août 1830 à St-Benoît, dans le comté de Deux-Montagnes. Selon l'auteur du livre, Henry W. Clark (qui n'avait pas la bonne date de naissance, il venait d'une famille bourgeoise, et le frère du père d'Alexandre était juge du village. Il reçut une éducation catholique chez les Jésuites. Après des recherches intensives, les généalogistes de L'Association des Choquet-te d'Amérique, Claude et Andrée Choquette, ont pu déterminer qu'il était le fils de Julien Choquet et Magdeleine Rastoule dit Vadeboncoeur.

A l'instar de deux de ses amis (Pierre et Frédéric Erusard) ayant émigré aux États-Unis (Nashua, New Hampshire), Alexandre voulait partir à l'aventure.

"Alexandre et les garçons comme lui se contentaient difficilement de la monotonie de leur vie; ils avaient la folle envie de défier la nature et ses extrêmes... au mieux, de la conquérir. Ils souhaitaient de tout leur être faire partie d'une oeuvre grandiose. Poursuivre leurs rêves par goût de découverte plutôt que pour devenir riches." (p. 5)

Il s'enfuit d'abord à Montréal [il aurait eu alors 12-13 ans, semble-t-il], où il travailla entre autres chez un apothicaire.

1848 Découverte de l'or en Californie

C'est en 1848 que l'on découvrit de l'or pour la première fois en Californie. La nouvelle se répandit bien sûr à Montréal. Laissons Henry W. Clark poursuivre:

"En 1849, tout le monde vantait la découverte de l'or en Californie et des centaines de gens traversaient les grandes plaines à la hâte dans leurs chariots couverts.(...) Alexandre occupait un emploi stable de commis et laveur de bouteilles chez un apothicaire, mais c'en était trop pour lui. Il répondit à l'appel de l'aventure, démissionna de son poste, et partit pour l'ouest." (pp. 13-14)

Du Canal Lachine à Duluth
Du Canal Lachine à Duluth
(Source de la carte: Microsoft Encarta 95)

De Duluth à l'Oregon Trail
De Duluth à l'Oregon Trail
(Source de la carte:
Microsoft Encarta 95)

Ainsi, à compter de 1849, il voyage vers la Californie à travers la plaine de l'ouest en passant par le Canal Lachine, le Canal Rideau, le Fleuve St-Laurent, les Milles-Îles, les Lacs Ontario, Erie et Huron, Sault-Ste-Marie, le Lac Supérieur, Winnipeg, Duluth, le Mississippi, St-Paul, St-Louis, Independance au Missouri, l'Oregon Trail et traverse les Montagnes Rocheuses et la Sierra Nevada pour arriver en juillet 1849 au sommet de Donner Pass en Californie.

"En juillet 1849, Choquette arriva à Donner Pass, d'où il pouvait apercevoir les forêts vertes de la Californie. Les frontières de l'or. Sa destinée pointait cependant vers le nord. Sa nature d'adolescent, son enthousiasme face à n'importe quel genre de travail, sa grande énergie et sa bonne humeur firent de lui un personnage très populaire auprès des mineurs. et des locaux habituellement peu disposés à se lier d'amitié." (pp. 14-15)

L'Oregon Trail
L'Oregon Trail
(Source de la carte:
Microsoft Encarta 95)

La Californie
(Source de la carte: Microsoft Encarta 95)

"Son premier travail consistait à s'occuper des chevaux et à escorter les nouveaux arrivants dans la traversée des vallées San Joaquin et Sacramento. Il en profitait en même temps pour apprendre les techniques de prospection minière auprès des vieux routiers."
(p. 16)

Pendant cette période, toujours selon l'auteur, bien sûr, Buck se lie d'amitié avec Joe Juneau. [Celui-ci découvrira de l'or en 1880, dans un endroit qui porte maintenant son nom et qui est la capitale de l'Alaska].

De 1851 à 1859, Buck remonte la Californie vers le Canada en longeant les rivières San Joaquin, Sacramento et Feathers, tout en continuant de chercher de l'or. Il apprend à connaître et à transiger avec les autochtones, ce qui lui sera très utile plus tard. Après un bref arrêt en Oregon, où il décide que la vie de fermier n?est pas pour lui, il poursuit sa route vers le nord.

1857 La Ruée vers le Fleuve Fraser

Un autre épisode de la Ruée vers l'or se déroulait au même moment, avec l'annonce de la découverte d'or dans la Vallée du Fleuve Fraser, en Colombie-Britannique. Les prospecteurs du nord de la Californie accourent:

La Colombie-Britannique
(Source de la carte: Microsoft Encarta 95)

"(..) Ils arrivaient au Fort Astor par radeaux et canots et longeaient la côte jusqu'à Victoria. Ils poursuivaient ensuite par le détroit de San Juan de Fuca pendant 160 milles sur de petites embarcations plus bizarres les unes que les autres... n'importe quoi, en autant qu'ils arrivaient là où l'or se trouvait ! Les mineurs californiens avaient entendu dire que l'or de la rivière Fraser était pur, et ils en étaient particulièrement excités." (p. 27)

Buck quant à lui, décide de se rendre dans la Vallée Fraser par les terres, et y restera quelques mois avant d'atteindre Victoria en 1859. Là, il se familiarise davantage avec la culture autochtone et avec le mode de fonctionnement de la compagnie de la Baie d'Hudson.

1861 - Premier voyage en Alaska

C'est à Victoria également qu'il entend parler pour la première fois de la rivière Stikine par les négociants et trappeurs qui en revenaient:

"(...) à leur retour, ils relataient leurs aventures dans les grandes montagnes, les cours d'eau et les forêts. Ce qui fascinait Buck au plus haut point était leur description de la grande rivière Stikine. Son embouchure près de Fort Wrangell laissait présager qu'elle était au moins de la taille de la Fraser ou de la Nass. S'il s'avérait qu'il en était ainsi, on pourrait certainement y trouver de l'or en quantité importante." (p. 40)

La Rivière Stikine
Source de la photo:
History of Wrangell

Il décida alors de s?y rendre, une chose plus facile à dire qu'à faire. Aucun trappeur ou négociants ne voulait faire un voyage aussi risqué. Sa connaissance de plus en plus poussée du "Chinook Jargon", la langue des autochtones, lui permit alors de s?allier avec un équipage d'indiens Tlinkits.

Ainsi, en 1861, Buck quitte Victoria en canot avec son équipage.

La Rivière Stikine
Source de la photo:
Defacto, Faits géographiques du Canada

"Les voyageurs d'aujourd'hui considèrent que les huit cent milles qui séparent Victoria du sud-ouest de l'Alaska, le "Passage intérieur", comptent parmi les plus beaux voyages maritimes du monde, parce qu'on peut faire le voyage dans le confort et la sécurité d'un navire de croisière. Même avec des équipements modernes et des instruments de navigation avancés, quiconque penserait aujourd'hui refaire le même trajet à bord d'une petite embarcation, devrait se préparer de façon exhaustive à entreprendre un périple extrêmement difficile. Buck et ses amis autochtones réussirent cet exploit en canot, sans carte, ni boussole, baromètre ou radar. Buck y allait en toute connaissance de cause. Ce voyage l'obsédait littéralement. Il allait au devant des marins expérimentés pour leur soutirer la moindre parcelle d'information au sujet de l'itinéraire et plus particulièrement des passages périlleux. Ce courage à toute épreuve et la certitude que ses rêves le mèneraient à l'or ont valu à Buck Choquette le titre de grand pionnier." (p. 42)

Ils passent par Queen Charlotte Sound et Fort Simpson. Cinq semaines plus tard, en juin 1861, après un voyage mouvementé, ils arrivent dans la région de la rivière Stikine, à Wrangell, en Alaska. (voir sites connexes)

Présenté au Chef Shakes, de la tribu des Tlinkits (voir sites connexes), il fait la rencontre de sa fille, Georgiana et bientôt la demande en mariage:

"Buck s'appliqua à respecter à la lettre les rites Tlinkits. Il demanda la main de Georgiana par l'entremise d'un intermédiaire. Le soir des noces, il revêtit les couvertures cérémoniales. On l'escorta ensuite chez les Shakes où, au beau milieu d'une grande pièce, les hommes l'encerclèrent en dansant aux rythmes des chansons de leur clan pour attirer la promise hors du coin sombre où elle se cachait. Finalement, tête basse, elle se manifesta, et alla rejoindre Buck. Assise à ses côtés, la musique reprit de plus belle. Le couple jeûna pendant les deux jours qui ont suivi la nuit de noces. Un mois entier s'écoula avant qu'on ne les reconnaissent officiellement comme mari et femme." (p. 59)

En juillet 1861, peu après son mariage, il part pour le haut de la rivière Stikine et découvre le glacier qu'il appellera dorénavant Ice Mountain:

"C'est à douze milles de là, après un tournant, que l'équipage l'aperçu pour la première fois. On aurait dit un cône gigantesque et une pyramide s'élevant de l'eau. Buck en avait vu des glaciers de loin, au nord de Victoria près de Wrangell, mais jamais d'aussi gros ni d'aussi près. (...) Buck était émerveillé par son immensité, sa beauté et sa magnificence. Il ne trouvait pas les mots justes pour le décrire. C'est ainsi qu'il le nomma "la Montagne de glace" [Ice Mountain en anglais]. Depuis ce temps, on l'appelle Montagne de glace ou Grand Glacier. Il sert de point de repère remarquable entre le Canada et l'Alaska, sur la Stikine." (pp 64-65)

1861 - À la recherche de l'or

Buck arrive ensuite dans le district minier de Cassiar. l'auteur de notre livre, Henry W. Clark, se fait poétique:

"Devant lui s'ouvrait le district de Cassiar: plus de 160 milles carrés, un empire intérieur de cent millions d'acres. C'est Alexandre Choquette qui l'a découvert et ouvert à la civilisation, aux milliers de chercheurs d'or venus y chercher fortune, et aux milliers d'autres venus le défricher au profit des générations futures." (p. 74)

Buck touche enfin au but dont il a tant rêvé:

"Il arriva ensuite à un genre de barrage [en anglais "bar] de roc et de sable. Buck décida d'y établir son campement pendant un certain temps, et de l'explorer plus en détail. Par un matin d'automne en 1861, alors qu'il y avait un soupçon de frimas dans l'air, Buck se réveilla très tôt, avant tous ses compagnons, et décida de ratisser les environs du barrage. Sa femme était en train de préparer le déjeuner pour les hommes lorsque soudain un cri de son mari la fit sursauter:

"Hi ! Yi ! Georgie," Les cris de Buck alarmèrent le reste de l'équipage qui accouru sur les lieux. Ils y trouvèrent Buck debout, riant comme un fou, qui leur brandissait son tamis [pan en anglais, un terme particulier à la Ruée vers l'or] à moitié plein.

"Il y a autant de reflets là-dedans que dans vos aurores boréales" dit-il. Il lava le minerai alors que ses hommes l'entouraient pour voir la poussière dorée qui miroitait à travers le gravier. Devant eux brillait de la poussière d'or avec plusieurs grosses pépites.(...)

C'était enfin la réalisation d'un rêve au bout d'un trajet qui avait mené Alexandre Buck Choquette à mille milles au nord, à travers des cours d'eau tumultueux, jusqu'alors inexplorés, et à cent milles à l'est à travers une rivière sauvage, encore jamais traversée par un homme blanc. "Buck's Bar", comme cet endroit fut alors baptisé, marquait non seulement la première découverte d'or sur la rivière Stikine ou dans le grand District de Cassiar, mais C'était la première découverte d'or en Alaska. [l'endroit fut baptisé Telegraph Creek quelques temps plus tard]. Cette grande découverte a été confirmée par des journalistes, des historiens, des géologues et les autorités gouvernementales à cause de sa signification importante: elle mena directement au Stampede de la Stikine en 1862 et 1863, à celui du Cassiar en 1874, de Treadwell - le célèbre Klondike de 1898 et au Stampede de Nome en 1900."

Mais quelques jours plus tard son épouse Georgiana, qui jusque là lui avait été d'une aide précieuse dans l'organisation de l'expédition, tombe malade. Buck retourne avec elle à un campement à l'embouchure de la rivière. Elle se rétablit et ils retournent ensuite à Wrangell.

1862 - Le héros de l'heure

A l'automne 1861, la goélette Nonpareil arrive à Wrangell. Buck en profite pour y embarquer lorsque le bateau retourne à Victoria:

"Le 10 janvier 1862, Choquette arriva à Victoria où il épata bien des gens avec ses anecdotes au sujet de l'or dans la rivière Stikine. Il était dans sa gloire. Il aimait les gens, il aimait parler, et par-dessus tout, c'était un éternel optimiste et enthousiaste. Il était le centre d'attraction, l'homme de l'heure. Il était un sujet parfait pour le Victoria Colonist, qui rapportait mot-à-mot et en détails ce qu'il racontait sur sa découverte. Emporté par son propre enthousiasme, il se permit d'embellir la vérité en prétendant que la rivière Stikine dépassait la Fraser en taille et qu'elle arrosait un pays plus beau qu'il ne l'était en réalité." (pp. 80-81)

Inutile de dire que ces déclarations provoquent un afflux de prospecteurs dans la région... A son retour de Victoria, des contretemps retardent le voyage, mais donnent lieu à une jolie anecdote:

"Il avait si hâte de partir qu'il remarqua à peine l'arrivée d'un missionnaire jésuite des Iles de la Reine Charlotte. Buck s'était bien promis, à la suite de la maladie de Georgiana l'automne précédent, de faire bénir leur mariage dans une église catholique. L'occasion allait lui en être donnée. Il implora le "Padre" de se joindre à lui sur le bateau Kingfisher en lui faisant remarquer que la distance qui les séparait de Wrangell était inférieure à deux cents milles. Le prêtre hésita, puisque son diocèse se limitait au nord à Fort Simpson, et que les prêtres russes orthodoxes de Sitka allaient peut-être interpréter ce geste comme une ingérence spirituelle. Buck mit alors son talent de grand parleur à l'oeuvre, et promit au prêtre qu'ils seraient de retour en une semaine, même si en réalité, il ignorait totalement s'il allait y avoir un autre bateau pour revenir au sud ! Le Padre fut intrigué à l'idée d'entreprendre ce voyage, et se laissa convaincre.

L'arrivée de Buck à Wrangell avec un prêtre et l'annonce d'un mariage imminent assura le rétablissement de Georgie et anima tout le village. Georgie insista pour se convertir au catholicisme; le prêtre lui enseigna donc pendant de nombreuses heures. Pendant ce temps, Choquette emprunta un entrepôt de la Compagnie de la Baie d'Hudson et y improvisa un autel. Il convainquit ensuite deux de ses collègues prospecteurs canadiens-français de devenir enfants de choeur, et un troisième, garçon d'honneur pour les besoins de la cause. Le chef Shakes et son conseil assistèrent fièrement à la cérémonie et Buck et Georgie furent mariés en bonne et due forme." (p. 83)

Il continue de prospecter, mais avec un succès mitigé. Plus tard cette année là, Buck écrit au journal Victoria Colonist...

"... qu'il avait remonté la rivière en avril jusqu'à Buck's Bar, et qu'il y avait longuement travaillé la terre. Les résultats n'avaient pas été glorieux, et il finit par admettre que sa découverte n'avait été qu'au plus une pochette riche, mais isolée." (pp. 92-93)

Il retourne à Wrangell, où Alexandre junior, son premier fils naît aux environs de mars 1863.

1866 - En affaires avec la Compagnie de la Baie d'Hudson

En 1866, sa vie va prendre une autre direction:

"Buck avait investi cinq années à prospecter dans la vallée Stikine, et il avait accumulé bien peu. Soit, ses revenus dépassaient ses obligations et il aurait été assez à l'aise financièrement n'eut été de sa façon de dépenser. Il prêtait de l'argent et faisait confiance à plusieurs de ses compagnons que la chance abandonna malheureusement par la suite. La naissance de son deuxième fils, Henry, avait ajouté à son fardeau financier et freinait l'envie qui l'habitait: celle d'accourir à la moindre rumeur de découverte d'un nouveau filon d'or. " (p. 98)

Après en avoir discuté avec ses compagnons prospecteurs, il décide de troquer la prospection minière pour le commerce. Le 13 mars 1866, il débute donc en affaires comme employé de la Compagnie de la Baie d'Hudson. Les archives de la compagnie, basée en Angleterre notent:

Armoiries de la Compagnie de la Baie d'Hudson

"...Nous avons pris des arrangements avec un marchand du nom d'Alexandre Choquette, un Canadien. Il a plusieurs années d'expérience de la traite sur la rivière Stikine et peut converser avec les autochtones. Il peut remonter la rivière et faire des affaires en notre nom l'été prochain. Sa présence permettra ainsi aux locaux de se familiariser avec les échanges que nous nous proposons de faire et les informera de notre intention d'établir un poste de traite en amont, au nom de la compagnie..." (p. 102)
(voir
sites connexes)

En 1867 il établit son magasin entre la rivière Porcupine et Ice Mountain où il demeurera avec sa famille jusqu'en 1870. Entretemps sa famille s?agrandit. Sa première fille, Geogiana, naît à l'été 1868. (Elle épousera plus tard un avocat, ancien étudiant de McGill).

De 1870 à l'été 1875, Buck réside à Boundary Post avec sa femme et ses quatre enfants. Henry W. Clark nous donne un aperçu de la vie à ce moment:

"La famille menait une vie semblable à celle des pionniers de l'ouest de classe supérieure. Le poste de traite était situé sur un terrain plat donnant sur une plage sablonneuse près du lit de la rivière. l'édifice principal comptait deux planchers à l'avant et un à l'arrière avec une toiture en pignons et un extérieur en bois rond. À l'arrière du magasin se trouvait un cabanon servant d'entrepôt; on y gardait la marchandise de valeur. Ailleurs sur le quart d'acre appartenant au magasin se trouvait une demi-douzaine d'édifices servant d'entrepôts ou d'hébergement pour les visiteurs qui venaient s?approvisionner. Le prestige de la compagnie avait été établi du fait qu'elle occupait un édifice plus grand que tout autre sur la rivière et que ses quartiers résidentiels comportaient des planchers de bois franc. Buck habitait au-dessus du magasin. Ses quartiers se détaillaient ainsi: un salon, une salle à dîner et trois chambres à coucher... vraiment pratique!(...)

Buck était toujours occupé à titre de négociant mais il trouvait la carrière de prospecteur plus intéressante. Lorsque le stock était livré au bord de la rivière, Buck devait vérifier chaque article pour s?assurer de la précision d'une liste que lui apportait le livreur. Il veillait ensuite à ce que les munitions et les articles périssables soient immédiatement transportés dans l'édifice principal. Les autres articles était également transportés dans les autres édifices dès qu'on le pouvait pour les protéger des intempéries et des animaux sauvages. Venait ensuite une fête pour permettre à tous de profiter des nouveaux articles." (pp. 113-114)

"Buck et sa famille se distinguait des autres pionniers, de la même façon que sa demeure dépassait celle des autres en confort et en dimension. Ses trois fils aînés, Alexandre, Henry et Peter reçurent le sobriquet de "Buck?s Boys" (les fils de Buck) dès leur naissance. On les appelait respectivement Aleck Buck, Henry Buck et Peter Buck. Ils étaient très jeunes quand on leur a appris à cueillir des baies, à pêcher, à patiner, et à marcher en raquettes. Au septième anniversaire d'Aleck, on l'escorta en aval à Wrangell pour sa première communion et on lui offrit un fusil de calibre .22; un double témoignage qu'il avait atteint l'âge de raison. Chacun des fils eut droit au même traitement à tour de rôle. Par la suite, on s?attendait d'eux qu'ils approvisionnement la famille en canards ou en oies, selon la saison. Ce n?est qu'à l'âge de neuf ou dix ans qu'ils devaient apprendre à chasser le gros chevreuil. Georgiana, quant à elle, étant la fille aînée, apprit à patiner, faire de la raquette et pêcher, comme ses frères, mais ses premières tâches étaient l'entretien ménager et la couture. Sa mère eut vite fait de lui apprendre la médecine artisanale si utile sur cette frontière. Puisqu'elle passait plus de temps au magasin que ses frères, elle se familiarisa avec les prix et les techniques de la traite. Buck lui inculqua l'art de reconnaître les fourrures de qualité. Dès l'âge de douze ans, elle se débrouillait aussi bien qu'un trappeur." (p. 166)

1875 - Querelles avec la compagnie de la Baie d'Hudson

Mais de nouvelles découvertes d'or redonnent la fièvre à notre ami Buck, qui décide de retourner prospecter tout en étant en charge du magasin de la Compagnie de la Baie d'Hudson. Commencent dès lors des querelles avec la compagnie qui n?aime pas trop que son employé abandonne le commerce. Mais même si le contrat est officiellement rompu en 1875, il semble que Buck et la Compagnie de la Baie d'Hudson feront encore commerce pendant les 20 années suivantes. En fait l'année 1876 fut même très lucrative, si on en croit ce qui suit:

Couverture de la Hudson's BayRapport d'un Comité de l'honorable Conseil exécutif de la Colombie-Britannique portant sur la frontière entre le Canada et l'Alaska", Victoria 1885 :

"À cet endroit, appelé "Buck?s", trente milles en amont de la rivière, en 1876, un Canadien français nommé Choquette, a opéré un grand poste de traite avec les Indiens des environs, qui, de par leurs anciennes associations avec la Compagnie de la Baie d'Hudson, préféraient transiger en biens britanniques. l'étendue du commerce de Choquette peut être évaluée du fait qu'à lui seul à Victoria, ses achats annuels correspondaient à vingt-cinq mille dollars, et ses ventes multiples et quotidiennes à un seul autochtone se chiffraient à douze cents dollars de couvertures de la Compagnie de la Baie d'Hudson, l'échange d'une couverture correspondant à une unité de valeur." (p. 131)

Après que Buck eut cessé officiellement ses activités avec la Compagnie de la Baie d'Hudson à Boundary Post, il construisit son propre poste de traite appelé "Bucks", d'où l'on pouvait apercevoir "Buck?s Bar", C'est-à-dire le site où il avait fait sa fameuse découverte d'or. Cet endroit était alors au coeur de la querelle entre le Canada et les États-Unis quant à l'endroit exact où se trouvait la frontière.

l'extrait suivant montre la progression de Buck durant les années qui suivirent:

"Entre 1878 et 1894, Choquette continua, de façon intermittente, à échanger des fourrures avec la Compagnie de la Baie d'Hudson et à obtenir des biens de la Compagnie pour lui permettre de faire la traite à son compte. Durant l'été de 1878, une lettre destinée à Choquette provenant du de l'agent en chef William Charles lui était adressée à Ice Mountain, Rivière Stikine; en 1880, son adresse avait changé pour Telegraph Creek; et entre 1883 et 1894, Choquette semblait avoir demeuré à Fort Wrangell, à l'embouchure de la rivière Stikine et sur le territoire américain. Ces changements ne reflétaient pas seulement des adresses différentes; ils symbolisaient également la façon dont Buck élargissait son champ d'action." (p. 137)

Entretemps, en 1886 Buck et sa famille se rendent dans l'est du Canada, à Montréal et Ottawa, où Buck a des affaires à régler avec les parlementaires. C'est là que son épouse Georgiana décède d'une maladie infectieuse (Small Pox). Elle est enterrée avec les Chefs Shakes en Colombie-Britannique. Avec 7 enfants à sa charge à ce moment-là, Buck retourne à Wrangell et décide de se remarier avec une parente de Georgiana.

En 1894, comme la traite des fourrures ralentit et la prospection minière se déplace plus au nord, une nouvelle richesse naturelle semble promise à un bel avenir: la pêche commerciale. Buck vend donc son magasin pour ouvrir à Red Bay, près de Wrangell, une saunerie, C'est-à-dire un endroit où l'on salait le saumon pour le conserver. Mais...

"Buck ne fut pas enchanté très longtemps par la vie de pêcheur, surtout loin du village sur une île. En 1894, il vendit sa saunerie et racheta son magasin général à Wrangell.

Plusieurs signes indiquaient qu'il aurait pu se permettre de s?établir: son âge, la taille de sa famille, et le stade qu'il avait atteint à différentes époques de sa vie d'homme d'affaires. Mais il avait la passion pour l'aventure, pour la découverte de l'or dans des régions lointaines, le goût d'être celui qui ferait "La" Grande Découverte, et le sang de stampeder coulait à flots dans ses veines." (p. 143)

1896 - Le Klondike

A l'automne 1896, George Washington Carmack, Tagish Charlie et Skookum Jim découvrent de l'or à Bonanza Creek, donnant ainsi naissance à la fameuse Ruée vers l'or du Klondike.

"C'est cette découverte qui allait enflammer l'esprit des gens de partout au monde lorsqu'un bateau arriva à Seattle, Washington avec une tonne d'or. Pas étonnant que la fièvre de la Californie de ?49 et de la rivière Fraser de ?58 se fit sentir plus forte que jamais en Buck. Il remit la charge du magasin à son épouse et à leur fille avec enthousiasme, tandis qu'il planifia et rassembla le nécessaire avec ses fils aînés Aleck et Henry. Il s?affaira tout l'hiver aux préparatifs de sorte à être prêt à se joindre à la ruée vers le Klondike dès l'ouverture du passage au printemps 1897." (p. 144)

Plusieurs itinéraires étaient possible pour se rendre à Dawson. Pour Buck, la meilleure route était certainement celle de la Stikine et de Cassiar, qu'il connaissait bien. Mais C'était aussi la plus dangereuse. Après s?être préparé tout l'hiver, il annonça à sa famille:

"Une chance comme celle-ci n?arrive qu'une fois dans une vie et je suis certain que je pourrai assurer un avenir enviable pour le reste de nos vies soit en travaillant comme prospecteur ou à la traite. Toutefois, le trajet vers le Klondike est trop difficile pour un septuagénaire et le passage Cassiar le serait trop aussi. Je maintiens qu'il s?agit du meilleur chemin pour s?y rendre et j?encourage Aleck et Henry à l'emprunter. Je vais vous accompagner, chers fils, pour le début du voyage, et reviendrai ensuite ici chercher Aggie (sa fille) pour l'emmener au sud, à San Francisco avec moi. C'est à cet endroit qu'il me sera possible de m?approvisionner avec les meilleures marchandises et les ramener par bateau-vapeur à St-Michael, et puis par bateau vers le Yukon. Je prévois que nous arriverons à Dawson à peu près tous en même temps." (p. 145)

Tel que prévu, les garçons de Buck arrivent à Dawson à l'été 1897 pour y rencontrer Buck et Aggie. La famille ouvre alors un magasin général. La ville était alors en effervescence, et Buck s?y sentait comme un poisson dans l'eau. Mais au printemps 1898, Henry, son fils préféré, est blessé mortellement près de Dawson dans une manoeuvre de halage d'un bateau à aube.

"Buck (...) s?effondra lorsqu'il apprit la nouvelle. (...) Tout le monde tenta de lui remonter le moral mais le Vieux Buck n?avait plus le coeur de continuer. Il rendit l'âme paisiblement ce printemps-là, en 1898. Buck Choquette n?aurait pas demandé que sa vie s?achève autrement. Dawson au Yukon en ?98 aurait bien pu être Wrangell en ?74, ou Fort Hope sur la Fraser en ?59 (...) l'armée de pionniers-prospecteurs de toute la côte du Pacifique qui pleurèrent sa mort savaient au plus profond d'eux-mêmes que la frontière, qu'elle fusse un campement de prospecteurs, un poste de traite, ou une tente dans la nature sauvage, venait de perdre un des leurs." (pp. 150-151)

Conclusion

Ayant couru après la richesse toute sa vie, Alexandre Buck Choquette laissa très peu d'argent à sa mort, une somme à peine suffisante pour faire transporter sa dépouille à Wrangell, Alaska, où il est enterré.

Le testament de Buck se trouve dans les archives du Yukon (source: David Mattison et Bob De Armand, un des historiens les mieux respectés de l'Alaska):

"Alexandre Choquette a fait un testament le 15 juin, 1898 et est décédé le ou vers le 17 juin, 1898, à Dawson. Il était résident de Dawson à cette époque.

Valeur de sa propriété en deçà de $1525, et consistant en:
1 titre sur Little Skookum
Un demi de l'intérêt de # 54 Jensen Creek
1 titre sur Eldorado Creek
Un sixième du # 19 ci-dessus sur Last Chance
Argent comptant: $1,000.
Valeur des biens énumérés ci-dessus: $500."

l'histoire de Buck, éternel aventurier et optimiste, est sans doute représentative de celle des prospecteurs d'or qui ont tout lâché pour aller au bout de leurs rêves, et qui se sont entêtés malgré les résultats parfois décevants:

"Les statistiques sur les ruées vers l'or font réfléchir: un stampeder sur dix gagna à peine de quoi payer son retour à la maison; un sur sept ne trouva pas d'or du tout, et seulement un sur des milliers devint riche." (p. 98)

Laissons le mot de la fin à son petit-fils, Henry W. Clark:

"On peut dire de ces hommes qu'ils étaient des rêveurs, éternellement à la recherche de richesses, de terres lointaines; ou encore qu'ils étaient intransigeants ou inconsistants. Eh bien oui, et ils étaient plus encore. Ils ne se contentaient pas de rester assis à la maison et de rêver, ils allaient à la rencontre de leur vision. Ils ont retroussé leurs manches et ont construit le nouveau monde d'arrache-pied plutôt que d'y penser bien confortablement chez-eux. Ils étaient l'essence-même de l'agitation divine. C'est pour cette raison qu'Alexandre Buck Choquette, ?Stampeder? est une partie vitale de l'histoire de l'Ouest."

Liens :

Sur la Ruée vers l'or :


Fort Wrangell et la Rivière Stikine :


Les Indiens Tlingits :


La Compagnie de la Baie d'Hudson :


Victoria, Colombie-Britannique :


Retour aux biographies de Choquette